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Et si Madison Keys était devenue la porte-parole du moment sur la santé mentale des athlètes ?


Manish Swarup/AP
Manish Swarup/AP

 

Madison Keys c’est un peu la joueuse qu’on voit toujours dans les tournois, et qu’on ne voit pas souvent dépasser les quarts ou les demis dans les grosses échéances. 9 titres WTA pourtant, et plusieurs années dans le top10, mais c’est l’image que beaucoup ont d’elle. Peu de chances de remporter un titre malgré sa puissance et son intelligence de jeu. Pourquoi penser comme ça ?

 


Le tennis s’est ouvert à elle de manière incongrue à l’âge de 4ans, grâce à Venus Williams et son… style !
« J’ai commencé à jouer à 4ans. Je suis allée dans la chambre de mes parents, et ils regardaient Venus Williams jouer, et je me suis dit que j’aimais cette robe de tennis. Je me suis dit que je voulais la tenue. Ma mère m’a dit que pour avoir la tenue il fallait jouer, donc c’est comme ça que j’ai commencé. Avec ce dernier titre je peux m’acheter plein de robes ! »



Repérée, elle rejoint la Chris Evert Academy en Floride en 2008. La légende du tennis disait d’elle récemment :
« Depuis ses 10 ans elle avait plus de puissance que n’importe qui de son âge. Dans un bon jour, elle pouvait battre n’importe qui, mais dans un mauvais jour elle pouvait faire beaucoup d’erreurs. Elle n’avait pas encore compris comment magnifier sa puissance. A 14ans, elle a battu une joueuse du top80 ». 
Cet engouement autour d’elle est à double tranchant : d’un côté ça transcende, ça motive et donne de la force. Et de l’autre côté, on peut se retrouver dans une spirale de pression et stress. Si on ne sait pas le gérer, le sport professionnel devient compliqué.
 
En finale de l’US Open en 2017 contre son amie d’enfance, Sloane Stephens, Madison s’écroule totalement et prend 6/0 dans le deuxième set. Une humiliation. En 2023, en demie finale de l’US Open contre Aryna Sabalenka, même scenario, Madison finit par s’écrouler.
Une question la hante alors : « Si je n’y arrive pas, serai-je un échec ? ». On y est, voila comment elle a réussi à exprimer cette spirale infernale, bien présente dans sa tête.

 

Aujourd’hui, après avoir gagné enfin un titre de Grand Chelem, Madison Keys s’est exprimée sur ce qui lui a permis de faire la différence et maitriser son jeu : la thérapie. Evidemment, cela ne fait pas tout. Mais pour Madison Keys, le déclic s’est fait la, le talent et le travail étaient déjà présents.
« Quand j’étais plus jeune, je pensais qu’il fallait gagner un Grand Chelem pour ne pas être un échec. Je pensais qu’il fallait que je gagne un titre pour être fière de moi. Il m’a fallu beaucoup de travail pour dépasser ce stade, parce qu’il fallait que je comprenne que c’était devenu un poids. C’était même surprenant, car beaucoup de choses sont sorties de moi et de ce que je disais, auxquelles j’avais cru. Cela m’a donné la possibilité de jouer plus libre, parce que j’étais déjà fière de ma carrière, je n’avais plus besoin de gagner un titre du Grand Chelem pour valider ce que j’avais accompli. »
Une fois libérée de ses croyances et comme elle les appelle, ses trous, elle a pu se libérer. Cela est aussi passé par son bonheur personnel. En novembre 2024, elle a épousé celui qui est devenu son coach, Bjorn Fratangelo.

Martin Keep AFP via Getty Images
Martin Keep AFP via Getty Images

« Mon mari jouait aussi mais il avait des blessures qui l’ont obligé à arrêter sa carrière. Je l’ai supplié de venir avec moi (à l’Open d’Australie, ndlr) parce qu’il ne voulait pas me dire ce que je devais faire. Mais c’était génial, et le fait de gagner ça ensemble c’est merveilleux. »

Cet Open d’Australie a été une masterclass de la part de la joueuse : battre Danielle Collins, sa compatriote américaine qui est si difficile à jouer, puis Elena Rybakina – gagnante de Wimbledon en 2022 – pour passer ensuite Elina Svitolina qui montrait un tennis si juste et puissant, qui avait infligé un 6/0 à Jasmine Paolini au tour précédent, c’était déjà de jolies prouesses. Le meilleur était encore à venir. Iga Swiatek, qui aime tant imposer son rythme de jeu et passer le moins de temps possible sur un court n’a pas compris ce que l’américaine lui a fait. Pour arriver en finale contre Aryna Sabalenka, la reine. Et la battre en 3 sets !

« Dans le 3e set, je me suis dit que je pouvais vraiment gagner. Dans les derniers jeux, j’ai eu confiance en moi et ça m’a libérée pour aller au bout. Tout le match je me disais d’être courageuse et de jouer de la manière que je voulais, comme un leitmotiv. »
 
Tout le tournoi, Madison Keys n’a cessé de clamer que la thérapie lui avait permis de se libérer de ses craintes. Elle n’avait plus besoin de gagner un Grand Chelem pour être fière d’elle-même. Et c’est à ce moment-là qu’elle le gagne, malgré un tableau si difficile, comme si cette pensée lui avait permis de libérer son tennis.




On parle bien de santé mentale, et de message envoyé aux autres athlètes : prenez soin de votre tête. Une fois la tête libérée, vous pourrez vraiment jouer. Le message est puissant, surtout dans un monde du tennis si redoutable : le tournoi WTA est très dur, demande beaucoup aux joueuses, dont beaucoup expriment leur difficulté de pouvoir vivre du tennis – a contrario de chez les hommes dans le top100. L’irrégularité qui en découle sur le classement rend la possibilité d’une longue carrière couronnée de succès très difficile.

Time
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Le tennis féminin, justement, est représenté par des icones telles que Chris Evert, Serena et Venus Williams… et Naomi Osaka. Naomi Osaka a été la première à autant parler de la santé mentale et de sa fragilité, avec tout le tapage médiatique autour. Elle a mis la lumière sur la pression que peuvent ressentir les joueuses (et les joueurs). En 2021, elle déclarait publiquement « It’s ok not to be ok » puis adressait la question de la santé mentale dans un article qu’elle a elle-même écrit dans le magazine Time :
« Il est devenu évident à mes yeux que littéralement tout le monde souffre de problèmes liés à leur santé mentale, ou connait quelqu’un qui en souffre. Le nombre de messages que j’ai reçus de tant de personnes le confirme. Je pense qu’on peut presque unanimement être d’accord sur le fait que chacun de nous est humain, ressent des choses et a des émotions »
A l’époque, elle avait dit qu’elle souhaitait éviter les conférences de presse post match de Roland Garros, en pointant la responsabilité des médias, pour préserver sa santé mentale. Choc dans le monde du tennis qui est tombé de haut.
« Dans mon cas, je sentais beaucoup de pressions pour parler de ce que je ressentais – franchement parce que la presse et le tournoi ne me croyaient pas. Je ne souhaite ça à personne et j’espère que nous pourrons prendre des mesures pour protéger les athlètes, surtout les plus fragiles. (…) Je demande donc un peu de confidentialité et d’empathie la prochaine fois que nous nous verrons ».
Naomi Osaka avait été critiquée pour parler si ouvertement de santé mentale et pour sa volonté de se protéger. Elle a permis au tennis de se libérer sur le sujet. Beaucoup depuis ont pu en parler plus librement et confier leur lutte pour combattre leurs démons. Parmi elles, Aryna Sabalenka, Maria Sakkari… et aujourd’hui Madison Keys a pris le relais comme porte-parole. Son conseil ? Trouver et travailler sur ses faiblesses.
« Vous devez trouver et travailler vos faiblesses. Si vous arrivez à trouver ca pendant votre carrière, cela vous permet de vraiment aimer ce que vous faites. En tant qu’athlètes on veut se libérer et jouer en aimant ce qu’on fait. Si on est capable de faire ça, et s’amuser, ça rend l’expérience encore meilleure. »
Avec un tel jeu et un esprit aussi libéré, Madison Keys risque de rentrer un peu plus dans les têtes des joueurs, à 29ans et avec déjà une jolie carrière derrière elle.

 

 

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